TVA & No-show

TVA sur les no-shows dans le secteur hôtelier : ce qu’il faut savoir

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La TVA appliquée aux sommes conservées par les hôtels en casd'annulation ou de non-présentation (no-show) est un sujet crucial qui est régipar une série de décisions judiciaires et des précisions de l’administrationfiscale au sein du BOFiP. Le traitement de ces sommes diffère en fonction de lanature de la compensation conservée par l’hôtelier, et il est important de biendistinguer les arrhes des acomptes pour éviter des erreurs fiscales et dessanctions.

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Les arrhes et leur régime de TVA

Dans un premier temps, la Cour de Justice de la Communauté européenne (CJCE) a tranché sur le caractère non imposable à la TVA des arrhes, à travers l'arrêt « Société thermale d’Eugénie-les-Bains » du 18 juillet 2007(aff. C-277/05). Dans cette décision, la CJCE a estimé que les arrhes constituent des indemnités forfaitaires versées pour réparer un préjudice encas de défaillance du client, notamment en cas d'annulation. Ces arrhes, qui sont par principe réciproques (le client étant également indemnisé si l'hôtelier ne fournit pas sa prestation), ne sont donc pas soumises à la TVA.

Les arrhes se distinguent des acomptes qui, eux,représentent une avance sur la prestation à réaliser et peuvent êtreintégralement conservés par l'hôtelier même si le client ne se présente pas.Dans ce cas, et surtout si ces montants couvrent l’intégralité de laprestation, la situation devient plus complexe vis-à-vis de la TVA.

Tentatives d'élargissement de cette jurisprudence

Certains opérateurs ont tenté de contourner cette décision en étendant la portée de l'arrêt Eugénie-les-Bains à des mécanismes où il n’existait pas de réciprocité. Ces pratiques consistaient à ne pas appliquer la TVA sur des sommes parfois égales à l’intégralité de la prestation, même en l’absence de compensation pour le client si l’hôtel ne pouvait pas fournir le service.

Ces tentatives ont conduit à des « anomalies économiques » : en l'absence de TVA sur ces sommes, les hôtels pouvaient bénéficier d'une marge plus importante en cas de non-présentation (no-show)que si le client consommait effectivement le service. Cette différence de traitement a attiré l'attention des administrations fiscales européennes, qui ont procédé à de nombreux redressements fiscaux pour rectifier ces pratiques.

Les arrêts CJUE et le cadre actuel

La CJUE est intervenue de manière décisive dans ce débat. Dans un arrêt du 23 décembre 2015 (aff. C-250/14 et C-289/14 « Air France-KLM»), la Cour a jugé que les sommes conservées par des prestataires (comme les compagnies aériennes) pour des services non consommés devaient être soumises à la TVA. Le principe sous-jacent est que le simple fait d'avoir mis à disposition du client un droit (celui de bénéficier d'une prestation) justifie la taxation. Ce raisonnement repose sur la valeur économique conservée par le prestataire : la prestation a été rendue possible, même si elle n'a pas été consommée.

Cette position a été confirmée et étendue à d'autres secteurs comme celui des billets de cinéma (CE, 15 avril 2016, n°373591,affaire MK2). Le Conseil d’Etat a estimé que le client acquiert un droit de bénéficier de la prestation, indépendamment de sa consommation effective.

Positions doctrinales et clarifications administratives

Jusqu’en 2022, l’administration fiscale n'avait pas mis à jour sa doctrine pour prendre en compte ces évolutions jurisprudentielles. Cela a permis à certains opérateurs de ne pas soumettre à la TVA des frais d'annulation, bien que ces derniers ne remplissaient pas toujours les conditions d’arrhes.

Le Bulletin Officiel des Finances Publiques (BOFiP), mis àjour le 11 mai 2022, a désormais clarifié cette situation. L'administrationprécise que les montants conservés pour des réservations non remboursables sontsoumis à la TVA, même si le client ne se présente pas ou annule sa réservation.Cela inclut explicitement les réservations de chambres d'hôtel et les montantsconservés par les compagnies de transport de personnes.

L'administration énonce également que la TVA s’applique même si le client ne supporte qu'une fraction du prix, comme le prix de la première nuitée dans le cadre d’une réservation multiple. De plus, même si le client annule formellement avant la période de réservation ou ne se présente pas, la TVA est due sur les montants conservés, car ces sommes sont considérées comme la contrepartie de la possibilité offerte de disposer des capacités réservées.

Evolutions jurisprudentielles

En juin 2022, la Cour administrative d'appel (CAA) de Paris a appliqué ce même raisonnement au secteur hôtelier. Elle a jugé qu’un hôtel qui conserve la totalité du prix d’un séjour, même en cas de no-show, doit soumettre cette somme à la TVA (arrêt n°20PA02348). Ce principe a été confirmé en janvier 2023, dans un cas similaire où seul le prix de la première nuitée avait été conservé (arrêt n°21PA05850). Ce dernier arrêt a donné lieu à un pourvoi devant le Conseil d’Etat qui a confirmé la position de la Cour d’appel sur la base des conditions générales de ventes. Le Conseil d’Etat opère une analyse des éléments contractuels et factuels pour déterminer s’il s’agit d’un mécanisme similaire à des arrhes.

Exceptions : Les arrhes

L’administration rappelle que les arrhes, en vertu de l’article 1590 du Code civil, ne sont pas soumises à la TVA. Ces arrhes, par nature, sont réciproques, c’est-à-dire que l’hôtelier devra restituer cette somme si la prestation n'est pas fournie. En revanche, si l’hôtelier conserve l’intégralité du prix, même en l'absence de prestation, cette somme sera soumise à la TVA.

Conclusion

Le traitement de la TVA sur les sommes conservées en cas de no-show dépend fortement de la nature de la somme (arrhes ou acompte) et de la réciprocité des obligations contractuelles. Les hôteliers et autres prestataires de services doivent donc veiller à bien qualifier les montants perçus afin d'éviter des redressements fiscaux. Le recours à des arrhes peutpermettre de limiter le risque de taxation, à condition de ne pas conserver la totalité du montant de la prestation.

Pour conclure, il est essentiel que les opérateurs respectent les règles strictes en matière de TVA sur les no-shows pour éviter d'éventuelles sanctions. De nombreux opérateurs traitent encore à la légère cette question et font face à des risques de redressement.

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Les rédacteurs

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Grégoire Person

Avocat associé

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Thomas Le Boucher

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